Le commandement en islam ‎

Introduction

le sujet suscite-t-il des divergences au sein de la nation ? ‎

Certains pourraient penser qu’en soulevant la question relative à l’Imamat, on s’engagerait ‎dans une polémique entre chiites et sunnites, ce qui est faux. Car en écartant le côté politique, et ‎en abordant la question d’un point de vue scientifique, on sera davantage informé des visions des ‎deux écoles, ce qui permettrait de réduire les divergences entre musulmans. ‎

La recherche scientifique permettra en premier lieu à chacune des parties d’exprimer ses ‎idées en toute liberté. Elle contribuera aussi à consolider les rapports de solidarité, d’amitié et de ‎fraternité qui les unissent. ‎

En second lieu, la véritable union apportera ses fruits abondants, car taire la vérité en ‎simulant l’union, ne contribuera pas au renforcement des liens que nous venons de citer et ‎n’aboutira pas à l’unification de la société musulmane. ‎

En troisième lieu, les contestations soulevées par telle ou telle communauté religieuse ‎supposent une parfaite connaissance de l’islam et de ses principes, qu’il s’agisse de ‎l’administration ou du leadership, et dont la réalisation est impossible dans une atmosphère ‎tendue, où chaque partie veut absolument imposer ses avis et rejette catégoriquement ceux de ‎l’autre. ‎

Définition générale de l’Imamat : ‎

L’Imamat, par définition et au sens large du terme, désigne l’autorité intellectuelle, politique ‎et religieuse. ‎

L’autorité religieuse ne signifie rien d’autre que l’application des principes de l’islam dans la ‎vie quotidienne, la réalisation des objectifs du message islamique au profit de l’humanité, ‎objectifs pour lesquels notre maître Mohammed, qu’Allah prie sur lui et le salue, a été envoyé et ‎pour lesquels il a lutté. ‎

La vision sunnite : ‎

Les savants sunnites, sont pour la plupart unanimes que l’Imamat ne signifie rien d’autre ‎que la succession. Ce sont donc deux synonymes et par conséquent la succession ou le califat ‎qui, en fait, est une grande responsabilité sociale et religieuse, se fait par élection. ‎

Le calife est celui qui s’emploie à trouver des solutions aux problèmes de la société ‎musulmane, tout comme il est responsable de la stabilité de l’ordre public à travers les forces ‎militaires et le contrôle des frontières de l’état islamique. C’est pourquoi l’Imam n’est qu’un ‎simple dirigeant et gouverneur social. ‎

Les fondements du calife à la lumière de la théorie sunnite : ‎

‎1‎        ‎- le calife ou l’Imam suivant la théorie sunnite, entre en fonction par voie élective, ce qui ‎fait du califat une responsabilité sociale et non pas un engagement vis à vis d’Allah. Il en résulte ‎que la jurisprudence devient secondaire dans la mesure où elle dépend du calife qui en a la ‎responsabilité et sort ainsi de son domaine dont l’Object dicté par Allah le tout-puissant. Or la ‎jurisprudence, sous ce dernier rapport, exige du calife, de grandes qualités intellectuelles pour être ‎en mesure d’assumer cette responsabilité. ‎

‎2‎        ‎- la prééminence dans la science et la piété, de même que l’infaillibilité, ne sont pas des ‎conditions exigées pour assurer les fonctions de calife. Bien plus, même si ce dernier tend vers ‎l’erreur, il n’en sera pas pour autant disqualifier. ‎

Un des savants sunnites les plus éminents dit à ce titre : « l’Imam n’est pas destitué en raison ‎de son impiété et de son injustice, de biens usurpés et de coups de fouets infligés à des innocents, ‎d’attentats à la vie, de droits usurpés, de limites dépassées ». ‎

‎3‎        ‎- le vote : le calife peut être élu suivant trois méthodes : ‎

‎-‎        par consensus de la nation ou des dirigeants. ‎

‎-‎        son prédécesseur le désigne comme successeur. ‎

‎-‎        par consultation (shûra). ‎

Il est certain que les avis des sunnites s’inspirent des événements qui ont eu lieu à l’aube de ‎l’islam ainsi que des méthodes qui ont été utilisées pour le choix d’un calife. Ces méthodes n’ont ‎aucun fondement et ne sont pas dignes de recherche. ‎

vision chi‘ite : ‎

Selon la vision shi‘ite, l’Imamat ne représente rien d’autre que des formes de walâya ‎‎(sainteté). ainsi, c’est Allah même qui désigne l’imâm ou le calife de la même façon qu’il le fait ‎pour les prophètes. car il choisit qui il veut d’entre ses serviteurs. il y a tout de même une ‎différence en ce sens que la prophétie est fondée sur un message tandis que l’Imamat se propose ‎de le protéger. ‎

Ainsi, il est indispensable pour la nation, qu’après le départ du prophète, qu’Allah prie sur ‎lui et le salue, un homme infaillible et intègre prenne en charge ses affaires, en d’autres termes un ‎homme remplissant toutes les conditions de la prophétie, à l’exception de l’inspiration (wahy). ‎

En effet, la présence d’un homme savant et infaillible est indispensable afin de servir ‎d’exemple à sa nation dans son cheminement spirituel. ‎

Le rôle d’un dirigeant dans l’éducation d’une société, produit des effets très marquants, plus ‎que ne le sont les effets produits par l’environnement familial ou les facteurs héréditaires ‎biologiques. ‎

L’Emir des croyants, Ali (AS) a dit : les hommes ressemblent à leurs souverains tout comme ‎ils ressemblent à leurs pères ». ‎

Étant donné qu’Allah est le seul à connaître cet homme infaillible, il est donc le seul, exalté ‎soit-il à posséder le droit de le choisir et de le désigner en qualité d’Imam. Ainsi l’Imamat est un ‎don divin, et comme pour la prophétie, le rôle des gens n’intervient pas. ‎

Importance à connaître l’Imamat : ‎

La théorie shi‘ite soutient que le califat ne peut être séparé de l’Imamat au même titre que la ‎qualité de dirigeant de l’envoyé d’Allah ne peut être séparée de sa qualité de prophète. car l’islam ‎représente du point de vue politique et moral un tout indissociable tout comme la dimension ‎spirituelle de l’islam ne peut être séparée de sa dimension politique. ‎

Outre le rôle pédagogique qu’assUme l’Imam en tant qu’exemple à suivre, il joue un autre ‎rôle qui est celui de préserver l’unité de la société et de la mettre sur la bonne voie en vue d’un ‎bonheur éternel. Le besoin qu’éprouvent les individus d’être pris en charge par un dirigeant qui ‎puisse gérer leur vie sociale, est naturel. Et comme l’islam est une religion naturelle dont les lois ‎sont en harmonie avec les besoins de l’homme, aussi bien sur le plan social qu’individuel, il est ‎donc nécessaire qu’il pourvoit à ce besoin naturel qu’éprouve la société. ‎

Allah le tout-puissant a mis à la disposition de l’homme tout ce qui est nécessaire à son ‎épanouissement physique et spirituel. Comment pourrait-on donc le priver de ce besoin naturel et ‎vital ? ‎

Selon les textes islamiques, l’Imamat est, à l’origine, l’esprit de la loi islamique, son essence. ‎

C’est pourquoi son exclusion ou sa marginalisation ferait de la religion un cadavre sans vie. ‎

Le noble prophète, qu’Allah prie sur lui et le salue a dit : « qui meurt sans connaître l’Imam ‎de son époque, meurt dans l’ignorance d’un païen ». ‎

Ce qui est très important et qui rend cette parole prophétique encore plus influente, c’est que ‎le paganisme qui se distinguait par l’absence de monothéisme, de prophétie et de morale, est mis ‎en rapport avec l’ignorance de l’Imamat. ‎

Interrogation : certains pourraient penser que la désignation d’un Imam ne s’accorde pas ‎avec les valeurs démocratiques et la liberté, dans la mesure où le dirigeant ou le calife devant ‎succéder au prophète, qu’Allah prie sur lui et le salue, n’est pas élu par la nation ou lui est, en ‎d’autres termes, imposé. ‎

Ce point de vue résulte du fait que l’on s’imagine que la désignation d’un Imam est signe de ‎despotisme. Pourtant on constate que les régimes autoritaires sont issus soit de putschs militaires, ‎soit de transformations sociales, soit encore d’une intervention étrangère. Par conséquent le ‎décideur ne peut être autre qu’un dictateur ou autre clan de dirigeants malhonnêtes qui ne remplit ‎pas la moindre condition des critères requis pour les fonctions de souverain. ‎

En revanche, l’Imamat, selon la vision shi‘ite, repose sur des conditions et des critères ‎incontournables sans lesquels nul ne peut prétendre aux nobles fonctions d’Imam. et, comme il a ‎été dit plus haut, Allah le tout-puissant, est le seul à choisir l’homme remplissant les conditions du ‎savoir, de l’infaillibilité et autres. ‎

Ainsi, ne peut être Imam que l’individu le plus parfait, choisi par Allah pour servir ‎d’exemple aux hommes et les mettre sur la bonne voie. Car l’Imam est cet individu qui jouit de ‎nobles qualités et que les passions ne dominent pas, c’est celui qui ne nourrit pas de prétentions ‎ou d’envies et qui est totalement soumis à Allah. ‎

L’Imam gouverne conformément à la loi divine et n’a pas d’avis à émettre, car le législateur ‎est Allah, le tout-puissant, l’unique conservateur de la loi. ‎

Étant donné que le législateur est le créateur de l’homme, le connaissant de tous ses secrets, ‎de ses aspirations et de ses intérêts et que le dirigeant est un individu choisi par Allah qui l’a doué ‎de savoir et l’a préservé de toute faillibilité, il est difficile de concevoir comment un ‎gouvernement établi sur de pareilles bases puisse être oppresseur. Ce gouvernement ne viole pas ‎la souveraineté de son peuple croyant à l’islam et l’ayant embrassé de son propre gré. ‎

La démocratie, est-elle le seul modèle susceptible de gérer au mieux la société ? ‎

En réponse à cette interrogation, il convient de soulever certains points : ‎

‎1‎        ‎- même si la démocratie implique par définition le pouvoir du peuple, elle ne reflète en ‎vérité que le pouvoir de la majorité et non pas celui de tout un peuple. ‎

‎2‎        ‎- peut-on prétendre qu’il existe réellement une démocratie ou un gouvernement ‎démocratique ? ‎

‎3‎        ‎- le droit revient-il à la majorité ? Si la majorité vote pour un avis contraire à la raison, aux ‎mœurs ou à la Shari‘a, son avis serait-il juste ? si la majorité, dans le but d’assouvir ses instincts, ‎opte pour la permissivité, quelle en sera notre attitude ? ‎

La permissivité et la perversion sexuelle qui ont vu le jour dans les pays démocratiques, ne ‎sont elles pas une tragédie inhumaine et immorale ? ‎

Le gouverneur ayant accédé au titre de dirigeant grâce à la majorité, ne s’emploie-t-il pas à ‎réaliser les aspirations de cette majorité, qu’elles soient légales ou illégales ? ‎

Il est évident que les élections ne débouchent pas sur le choix du plus pieux des hommes, ‎aussi la majorité ne peut constituer un moyen d’évaluation de la justice et de l’injustice. ‎

Les élections organisées de cette manière, signifient qu’une frange importante de la société, ‎qui constitue la minorité quoique sans preuve rationnelle convaincante, sera lésée dans ses droits, ‎car elle sera obligée de se soumettre aux théories de la majorité et à ses intérêts. ‎

Cependant, lorsque l’élection s’opère d’en haut, l’ensemble des intérêts sera pris en ‎considération, intérêts véritables qui n’obéissent pas aux passions. Car le pouvoir, à ce moment là, ‎reviendrait à Allah seul, seigneur de l’univers et non pas à la majorité ou à la minorité. ‎

L’Imamat est-il une nécessité sociale ? ‎

Certain peuvent se poser la question sur l’importance de la désignation de l’Imam par Allah ‎le tout-puissant ou de l’élection du dirigeant par la nation. ‎

En réponse à cette interrogation, il convient de souligner que si une nation donnée est ‎dépourvue de dirigeant, l’anarchie y régnera tandis qu’elle sera en danger de disparition. ‎

Ainsi, nous remarquons à travers la longue marche de l’histoire, que le phénomène du ‎leadership a toujours accompagné l’humanité. Nous sommes donc face à deux cas : la présence ‎d’un Imam ou son absence. Dans le deuxième cas, l’absence de l’Imam entraîne la disparition de ‎la société. Dès lors seul le premier cas est retenu. ‎

Comme l’Imamat ou le commandement est une nécessité sociale, il reste à savoir les qualités ‎que doit posséder l’Imam. Ainsi, soit il est savant, juste et vertueux, en un mot, pieux, soit il est ‎injuste, pervers, méchant et égoïste, en un mot, impie. ‎

Il est logique que la raison et la conscience morale optent pour le premier dirigeant ou Imam. ‎mais il arrive qu’on se retrouve devant un autre choix, lorsqu’il s’agit de deux hommes, l’un ‎pieux et l’autre plus pieux, l’un vertueux et l’autre plus vertueux et c’est là que survient alors la ‎question de la préférence qui a suscité des divergences entre sunnites et shi‘ites. ‎

La plupart des sunnites jugent que l’Imamat revient à celui qu’ils estiment être bon au ‎détriment du meilleur, vision qui n’est pas en accord avec la raison qui refuse le choix arbitraire. ‎Comment donc pourrait-on donc privilégier le bon sur le meilleur ? ‎

Ainsi, il ne reste plus qu’un seul choix, la présence d’un Imam qui est au-dessus des gens de ‎son époque dans tous les domaines. la vision shi‘ite est donc la vision qui est en accord avec la ‎raison, la nature et la conscience morale. elle ne met pas un frein à la liberté, elle ne tend pas vers ‎le despotisme et ne contredit pas la raison. c’est une vision qui soutient que c’est Allah, exalté ‎soit-il qui a créé l’homme et la société et qui sait plus que quiconque où se trouvent ses véritables ‎intérêts et c’est lui le plus miséricordieux. c’est pourquoi, son choix demeure le meilleur et le ‎mieux adapté à la raison et à la nature humaine. ‎