La famille du Prophète dans le Saint Coran

Un des événements importants de la vie du Prophète, Dieu le bénisse lui et les siens, est le jour nommé “jour de la mobâhala”, qui eut lieu le 24 du mois de dhou l-hiddja en l’an 9 de l’Hégire.

Une délégation de chrétiens de la vallée de Nadjrân, qui était à l’époque le haut lieu du christianisme en Arabie, était venue à Médine et avait commencé à controverser avec le Prophète, Dieu le bénisse lui et les siens, sur la nature de Jésus. Dieu révéla alors environ 80 versets de la sourate 3 (dite précisément “la famille de ‘Imrân”, âl ‘Imrân).

Et Dieu commence l’argumentation qu’Il révèle à Son messager en disant, aux versets 33 et 34 de la sourate 3 :

إِنَّ اللَّهَ اصْطَفَى آدَمَ وَنُوحًا وَآلَ إِبْرَاهِيمَ وَآلَ عِمْرَانَ عَلَى الْعَالَمِينَ ذُرِّيَّةً بَعْضُهَا مِنْ بَعْضٍ

Traduction : En vérité Dieu a élu Adam, Noé, la famille d’Abraham et celle de ’Imrân au dessus [des habitants] de [tous] les mondes, descendants les uns des autres…

Puis Dieu commence à évoquer divers membres de la famille de ‘Imrân, en commençant par son épouse Hanna (= Anne, qui n’est pas nommée dans le Coran, mais dans les hadiths) et leur fille Maryam (= Marie) mère de ‘Issâ le Messie (= Jésus-Christ). Dieu parle également de Zakariyâ (= Zacharie), frère de ‘Imrân et mari de la sœur de Hanna, Zakaryâ qui deviendra le père de Yahya (= Jean le Baptiste), lequel est donc cousin de Marie mère de Jésus aussi bien par son père que par sa mère (son père étant le frère du père de Marie et sa mère étant la sœur de la mère de Marie).

Jésus-Christ, évoqué à partir du verset 45, apparaît ainsi au cœur d’une famille divinement élue, et il en est le descendant par Marie, ce qui établit la validité du rattachement au lignage maternel, lorsque ce lignage est seul existant ou lorsqu’il a la précellence.

Quant au fait que Jésus-Christ n’ait pas de père, Dieu répond à ceux qui voudraient en faire un argument pour en faire le “fils de Dieu” (mais Dieu est innocent de ce qu’ils lui attribuent), Dieu répond dans le verset 59 de la sourate 3 en disant :

إِنَّ مَثَلَ عِيسَى عِنْدَ اللَّهِ كَمَثَلِ آدَمَ خَلَقَهُ مِنْ تُرَابٍ ثُمَّ قَالَ لَهُ كُنْ فَيَكُونُ

Traduction : Le cas de Jésus est pour Dieu comme celui d’Adam : Il l’a créé de terre, puis lui a dit : “Sois” et il fut.

Mais les chrétiens de Nadjrân ne se satisfirent pas de cela et voulaient continuer de polémiquer. Dieu révéla alors à Son messager, Dieu le bénisse lui et les siens, le verset 61 de la sourate 3, connu sous le nom de “verset de la mobâhala” :

فَمَنْ حَاجَّكَ فِيهِ مِنْ بَعْدِ مَا جَاءَكَ مِنْ الْعِلْمِ فَقُلْ تَعَالَوْا نَدْعُ أَبْنَاءَنَا وَأَبْنَاءَكُمْ وَنِسَاءَنَا وَنِسَاءَكُمْ وَأَنْفُسَنَا وَأَنْفُسَكُمْ ثُمَّ نَبْتَهِلْ فَنَجْعَلْ لَعْنَةَ اللَّهِ عَلَى الْكَاذِبِينَ

Traduction : Quant à ceux qui argumentent contre toi à son propos, après ce qui t’est venu comme science, dis[-leur] : “Venez, appelons nos fils et vos fils, nos femmes et vos femmes, nous-mêmes et vous-mêmes, puis implorons et invoquons la malédiction de Dieu sur les menteurs”.

Que nous disent alors à l’unanimité les commentateurs et les historiens à ce propos ? On ne citera que deux commentaires, parmi les plus répandus et les plus vénérés dans le monde sunnite.

Le premier est le Tafsîr al-djalâlayn, où l’on peut lire en commentaire de ce verset :

[…] وقد دعا صلى الله عليه وسلم وفد نجران لذلك لما حاجوه […] فأتوا الرسول صلى الله عليه وسلم وقد خرج ومعه الحسن والحسين وفاطمة وعلي وقال لهم إذا دعوت فأمنوا فأبوا أن يلاعنوا وصالحوه على الجزية

[…]

Traduction : [Le Prophète], Dieu le bénisse et lui donne la Paix, convia donc la délégation de Nadjrân à faire cela lorsqu’ils argumentèrent contre lui. Ils vinrent donc trouver le Messager, Dieu le bénisse et lui donne la Paix, qui était venu accompagné de Hassan, de Hossayn de Fâtima et de ‘Alî, auxquels il dit : “Lorsque j’invoquerai Dieu, dites amen”. [Les chrétiens de Nadjrân] refusèrent de se livrer à une imprécation mutuelle et convinrent de payer le tribut (djizya).

Le second commentaire est tiré du Tafsîr Ibn Kathîr, où l’on peut lire (v.1 p.371-372) :

عن جابر […] قال فغدا رسول الله صلى الله عليه وسلم فأخذ بيد علي وفاطمة والحسن الحسين ثم أرسل إليهما فأبيا أن يجيبا وأقرا له بالخراج […] قال جابر وفيهم نزلت تعالوا ندع أبناءنا وأبناءكم ونساءنا ونساءكم وأنفسنا وأنفسكم قال جابر أنفسنا رسول الله صلى الله عليه وسلم وعلي بن أبي طالب وأبناءنا الحسن والحسين ونساءنا فاطمة وهكذا رواه الحاكم في مستدركه […] ثم قال صحيح على شرط مسلم ولم يخرجاه […] وقد روي عن ابن عباس والبراء نحو ذلك

Traduction : Djâbir [Ibn ‘Abd Allâh al-Ansârî] a dit […] : “Le Messager de Dieu, Dieu le bénisse et lui donne la Paix, vint au matin, tenant par la main ‘Alî, Fâtima, Hassan et Hossayn, puis il envoya chercher [les deux chefs de la délégation chrétienne de Nadjrân]. Ils refusèrent de répondre [à cette convocation] et acceptèrent de lui verser l’impôt (kharâdj).” […]

Djâbir a aussi dit : “C’est à leur propos qu’à été révélé “appelons nos fils et vos fils, nos femmes et vos femmes, nous-mêmes et vous-mêmes” : “nous-mêmes”, c’est le Messager de Dieu, Dieu le bénisse et lui donne la Paix, et ‘Alî fils d’Abou Tâlib ; “nos fils”, ce sont Hassan et Hossayn ; et “nos femmes”, c’est Fâtima.”

C’est également ainsi que le rapporte al-Hâkim dans son Mostadrak […] en disant : “ce [propos] est valide (sahîh) selon les conditions de Moslem, mais [lui et Bokhârî] ne l’ont pas consigné.” […]. Ibn ‘Abbâs et al-Barrâ’ ont aussi rapporté à peu près la même chose.

Il n’y a donc pas la moindre divergence sur le fait que, lors de la mobâhala contre les chrétiens de Nadjrân, le Prophète, Dieu le bénisse lui et les siens, n’était accompagné que de l’Imam ’Alî, Dieu ennoblisse son visage, de Fâtima, d’al-Hassan et d’al-Hossayn, que la Paix soit avec eux, pas une personne de plus ni une personne de moins, à l’unanimité de tous les musulmans.

Ainsi, le Prophète, Dieu le bénisse lui et les siens, ne prit avec lui ni son épouse ’آ’isha, ni le père de cette dernière Abou Bakr, ni aucune autre de ses épouses ni aucun autre de ses compagnons.

En méditant ce verset et cet événement, on ne peut donc que se faire les réflexions suivantes :

1) Lorsque Dieu donne l’ordre au Prophète, Dieu le bénisse lui et les siens, de prendre avec lui “ses femmes”, comment se fait-il que le Prophète n’ait pris avec lui que Fâtima et qu’il n’ait pas pris avec lui son épouse ’آ’isha ni aucune autre de ses épouses ?

L’expression coranique “nos femmes” ne peut en ce cas pas signifier ici “nos épouses” (car sinon Fâtima n’aurait pas été là). “Nos femmes” signifie donc “les femmes de notre famille”.

Or, pour représenter à elle seule “les femmes de la famille du Prophète”, il faut bien que Fâtima soit la seule et unique femme de la famille du Prophète, Dieu le bénisse lui et les siens, ou bien la seule à être véritablement représentative de la famille du Prophète, Dieu le bénisse lui et les siens. Il n’y a pas d’autre alternative.

Et l’on ne peut évidemment pas objecter que les épouses du Prophète, Dieu le bénisse lui et les siens, n’étaient pas présentes, car toutes étaient bien là, à Médine, dans leurs chambres situées sur le pourtour de la mosquée du Prophète ; la délégation chrétienne accomplit même sa prière dans la mosquée du Prophète ; la demeure ou vivaient ‘Alî, Fâtima et leurs enfants ouvrait elle-même sur l’intérieur de la mosquée du Prophète ; c’est donc de là que le Prophète sortit avec eux au matin et envoya chercher les chefs de la délégations…

2) Lorsque Dieu donne l’ordre au Prophète, Dieu le bénisse lui et les siens, de prendre avec lui “ses fils”, le Prophète, qui n’a pas de fils, a pris avec lui ses petits-fils, les fils de sa fille Fâtima, ce qui montre que ces deux petits-fils du Prophète sont considérés par Dieu et par le Prophète lui-même comme ses propres fils.

3) Lorsque Dieu ordonne au Prophète, Dieu le bénisse lui et les siens : Dis : “Venez, appelons nos fils et vos fils, nos femmes et vos femmes, nous-mêmes et vous-mêmes…, l’expression “appelons… nous-mêmes” (au pluriel) ne voudrait rien dire si elle ne concernait que la personne du Prophète, Dieu le bénisse lui et les siens.

L’expression “appelons… nous-mêmes” ne peut donc signifier que “appelons les nôtres, nos proches”.

Or, le Prophète, Dieu le bénisse lui et les siens, n’a pris avec lui comme “proche” et comme représentant de “nous-mêmes” ni Abou Bakr, ni Omar, ni aucun autre compagnon, ni aucun des Banou Hâshim, ni même son oncle al-’Abbâs, qui était pourtant présent et qui était la personne la plus proche du Prophète en terme de lignage généalogique.

La seule et unique personne que le Prophète prit avec lui comme “proche” et comme représentant de “nous-mêmes” fut ’Alî Ibn Abî Tâlib, et nul autre avec lui.

Remarquons que ce qui est en question ici n’est pas simplement la succession politique du Prophète, Dieu le bénisse lui et les siens, mais bien le fait de savoir qui sont les “proches parents du Prophète” qui ne seront jamais séparés du Coran jusqu’au jour de la Résurrection et qui sont donc, aux côtés du Coran, les véritables garants, transmetteurs et représentants de la Sunnah la plus authentique.

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